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John Cage

Compositeur américain. Né à Los Angeles le 5 septembre 1912, mort à New York le 12 août 1992. Après des études brillantes, il s’initie à la technique musicale avec Richard Buhlig et Adolph Weiss, reçoit pour ses premières œuvres les conseils d’Henry Cowell et devient l’élève d’Arnold Schönberg, qui décèle en lui un «inventeur de génie». Il n’hésitera pas pour autant à outrepasser l’enseignement (essentiellement harmonique et contrapuntique) de son maître. Celui-ci n’a-t-il pas, dans son Traité d’harmonie de 1911, prophétisé l’avènement d’une musique centrée sur le timbre, et non plus seulement sur la dimension des hauteurs ? Plus royaliste que le roi, Cage va s’engager dans la voie de l’exploration des sonorités pour elles-mêmes: dans le sillage de Varèse (Ionisation pour treize «batteurs» avait été créée en 1931), il se voue à la percussion, seul moyen de «libérer» les sons. Accompagnateur – à l’âge de 25 ans – à la classe de danse de la Cornish School à Seattle, il réclame, dans un manifeste célèbre, l’ouverture de studios de musique électronique à l’intention des compositeurs. Il créera – avant Pierre Schaeffer – les premières pièces «électro-acoustiques» : Imaginary Landscape No 1 (1939) ; The City Wears a Slouch Hat (1941). Mais c’est l’invention du «piano préparé» – Bacchanale (1938); Seize sonates et quatre interludes pour piano préparé (1948) – qui le fera connaître du grand public: par l’introduction d’objets divers (écrous, boulons) transformant ce dernier en un véritable orchestre de percussions. Le caractère «orientalisant» des sonorités («balinaises») ainsi obtenues renvoie effectivement au souci profond d’universalisation qui anime le musicien. Déjà nourri de philosophie indienne, Cage suit, de 1951 à 1953, les leçons du diasetz Zeitaro Suzuki à l’université de Columbia, et entreprend d’appliquer à la musique d’abord, et à toutes les sphères de ses activités ensuite, le principe d’interprétation sans obstruction propre à la logique du bouddhisme kegon. En zéniste accompli, il se défiera désormais des pulsions de son «ego», et s’en remettra aux tirages au sort des oracles du Yi-King pour se constituer une poétique de l’imprévisible faisant ouvertement appel au hasard. 1952 est l’année charnière de la Music of Changes pour piano et de la pièce silencieuse 4’33’’, que va suivre, avec l’invention du «happening» et de la «live electronic music» une pléiade d’œuvres révolutionnaires. Devenu mondialement célèbre, Cage continuera à défrayer la chronique, tant en organisant des «happening» monstres – les «Musicircuses» à partir de 1967, le «train musical» de Bologne en 1978, le Roaratorio d’après Finnegans Wake en 1979 – qu’en «ordinateurisant» des œuvres complexes comme HPSCHD (1969) ou les cinq œuvres de la série Europa (1984-1992). Sa production, devenue fluviale (plus de 60 partitions de 1987 à 1992), a ouvert la voie à toutes les innovations de la fin du XXe siècle en matière musicale; mais l’impact de l’«anarchisme» cagien a très largement débordé la musique: plus de quinze livres ont fait de Cage l’un des écrivains les plus en vue de l’Amérique d’aujourd’hui; professeur de poésie à Harvard, il s’est imposé comme le maître de la poésie «expérimentale»; ses gravures ont fait le tour du monde; il a fondé la Société de mycologie de New York. La liste n’est pas close … Daniel Charles