L’Effondrement
Hans Erich Nossack
Le 21 juillet 1943, Hans Erich Nossack, écrivain pacifiste de gauche, qui n’a encore pratiquement rien publié, décide d’aller passer quelques jours dans la campagne proche d’Hambourg. Il ne sait pas que dans la nuit du 24 et jusqu’au 3 août aura lieu «l’opération Gomorrhe», menée par les Alliés et qui a pour but la destruction de la ville allemande : 350’000 habitations détruites et près d’un million de civils sans abri. Il assiste à distance au Feuersturm, «la tempête de feu».
Hans Nossack est témoin direct de la destruction apocalyptique de sa ville natale et du désarroi des fugitifs, devenus des réfugiés : « Pour moi, la ville s’est effondrée comme un tout, et pour moi le danger consista, voyant et sachant cela, à être écrasé par la souffrance du sort commun. » Il en fait un témoignage direct, un rapport écrit trois mois après l’opération. Le franchissement de cet abîme et la mission dont il se sent investi de le décrire donnent sur-le-champ à Nossack sa véritable voix d’écrivain.
Une voix intemporelle qui résonne encore aujourd’hui en Syrie et ailleurs : les camps de réfugiés, les fugitifs et les migrants arrachés violemment à leur terre. Avec le risque aussi mental que physique d’un effondrement.
Selon W. G. Sebald, L’Effondrement est l’un des textes les plus importants et les plus justes de ce que l’on a appelé «la littérature des ruines» : «Il semble que parmi les écrivains allemands, à la seule exception de Nossack, aucun dans ces années n’ait été disposé à ou en mesure de coucher sur le papier la moindre ligne relatant le déroulement et les effets d’une campagne de destruction aussi longue et d’une telle ampleur.»
Lire la chronique du livre sur En attendant Nadeau.