Fission
Lise Meitner, «la femme à qui l’humanité doit la fission de l’atome» jouait du piano. Je l’imagine à son instrument, après son refus de traverser l’Atlantique pour venir travailler à la fabrication d’une bombe d’une puissance alors encore inconnue. Sous ses doigts, s’échappent quelques notes, quelques sons qui disent la mélancolie d’un futur inquiétant. Avec d’autres, elle a «réveillé la matière». Fascinée par la beauté du bleu radioactif qui laisse présager l’immersion de tous les êtres vivants «dans un flux de neutrons qui s’entrechoquent», elle ne doute pas, comme Daniel de Roulet trois quarts de siècle plus tard, que «l’humanité est entrée pour des milliers d’années dans la condition atomique».